Il aurait voulu pouvoir partir, Aiden avait essayé de se défaire du centre, s’accrochant à la main de Jade avant qu’elle ne disparaisse ; elle aussi. La panique le prend, tout s’éteint en lui comme si son monde s’était écroulé en une fraction de seconde. Et il hurle, à en perdre ses cordes vocales, cherchant autour de lui comme un enfant qui aurait perdu ses parents. Aiden angoisse, Aiden essaie de marcher jusqu’à basculer, à nouveau, jusqu’à hurler lorsqu’il sent qu’on vient marcher sur sa jambe sans qu’il ne puisse y faire quoi que ce soit. Il se recroqueville sur lui-même, luttant pour se protéger au mieux mais les tentatives sont vaines et les coups – inconscients – persistent. Un chacun pour soi plus brutal que ce qu’il aurait pu être, si les circonstances s’étaient calmées, s’il avait choisi de rester à sa place plutôt que de se risquer dans le passage. Et sa tête commence à tourner, et tout autour de lui commence à se flouter comme pour l’empêcher de voir davantage d’horreur jusqu’à ce qu’il ne pose son regard sur sa jambe, sur le bout de bois qui s’y est enfoncé un peu plus tôt, sur cette blessure que Jade avait voulu soigner avant qu’elle ne lui soit prise. Les larmes coulent d’elles-mêmes, ne laissant nul autre choix à Aiden que de les accepter, de les laisser pour parer aux hurlements qui s’étouffent dans sa gorge. Il cède, complètement, essayant dans un élan de lucidité, de trouver le poste de soin le plus proche, en profitant lorsque la foule commence enfin à s’estomper. Et s’il était presque parvenu à ce souhait-là, l’azur brisé de ses prunelles se porte sur Phoenix, non très loin de lui, à même le sol, elle-aussi. Un haut le cœur s’invite, rapidement, presque aussi instinctivement qu’il n’en vient à essayer de s’approcher d’elle, faisant l’imprudent en bravant ses maux, la blessure qui le rattrape aussitôt et le fait basculer vers l’avant. Il avait voulu essayer, il avait voulu l’aider à défaut de ne pas l’avoir gardé près de lui, elle-aussi. « S’il vous plait, aidez-la ! »

Il aurait voulu pouvoir faire plus pour elle mais rien ne lui vient, rien ne se laisse entendre non plus étant donné le fond sonore qui, à chaque seconde, semble s’amplifier. Parce que les sirènes résonnent, ici et là, elles n’ont de cesse de hurler comme pour rappeler l’urgence de l’instant à quiconque l’aurait oublié. Lui non, il ne fait qu’y penser, plus encore quand sa jambe recommence à le lancer. Pourtant il lutte, Aiden ne veut pas avoir à y faire face tandis que d’autres sont en danger, d’autres plus importants que lui, dans le fond. Ça suffit au bibliothécaire pour prendre sur lui, se retenir d’hurler lorsque les rôles s’inversent, lorsqu’elle tente au mieux de l’aider à se relever. La volonté n’y est plus, finalement, lorsque le poids sur sa jambe lui coupe carrément le souffle. Le pire est à venir, il ne songe qu’à ça en se résignant à l’écouter, malgré tout ; allant pour attraper sa main lorsqu’elle essaie de lui faire entendre qu’elle n’est pas en mesure de rester avec lui, en vain. Phoenix lui échappe et Aiden attend, Aiden s’inquiète, Aiden panique, balayant toute la foule du regard, cherchant le moindre visage familier qui pourrait le sortir de cette angoisse trop violente pour ses maigres forces. Mais il se résigne à baisser la tête, à prendre sur lui, à oser un dernier regard sur sa jambe tandis que les soigneurs sont occupés ailleurs. Il sent son cœur prêt à imploser, il sent que tout son monde s’effondre, à commencer par sa stabilité. Mais on ne lui laisse pas le temps de perdre entièrement le contrôle, Phoenix revenant vers lui bien qu’accompagné cette fois ; par pas plus utile que lui au final. Il soupire, essayant de retenir les tremblements qui s’invitent dans chacun de ses membres. Il laisse passer un petit temps, s’enfermant sur lui, dans son coin, désireux de ne plus rien entendre, de ne plus rien écouter. Jusqu’à ce qu’une voix ne lui parvienne, suffisamment proche pour comprendre que c’est à lui qu’on s’adresse. Elle veut son nom, lui donnant le sien en échange. Jessica. Il cherche, il essaie, sachant son visage connu de sa mémoire. Il se concentre sur ça plutôt que sur la douleur, il fait de son mieux, en tout cas. Mais ses prunelles n’ont de cesse de se poser sur l’homme avec qui elles avaient pu arriver, ses sourcils froncés. « Hm, Aiden. Est-ce qu’il va bien ? » Mieux que lui en tout cas, ou il semblerait bien que sonné. Il l’espère pour lui, en tout cas. Et, tandis qu’il va se concentrer à nouveau sur la jambe femme, un nouveau bruit se laisse entendre, le faisant sursauter, lui et tous les autres à ses côtés. « Faut pas qu’on reste là, putain… » Souffle-t-il, tremblant davantage, prenant son courage à deux mains pour oser un franc regard sur sa jambe. Il faut qu’il s’en débarrasse de ce truc, et au plus vite.

La situation devient totalement incontrolable, et ça, Phoenix a du mal à le supporter. La place commence à se vider un peu, ou du moins la foule s'est enfin un peu mieux répartie dans les rues alentours. Mais cela laissait place à un spectacle encore plus désolant, celui des blessés, et pire encore, celui des morts. Ils seraient terriblement nombreux, c'est indéniable. Mais Phoenix doit se reconcentrer. Elle aide une jeune femme a mener un homme visiblement sonné vers le poste de secourisme. Elle l'aide à l'installer cet homme sur une table vide, juste à côté d'Aiden. L'effort a encore couté beaucoup à la jeune femme, qui devient de plus en plus pâle. Mais elle se retourne vers Aiden, lui saisissant la main, doucement. Elle le sent qui tremble, qui panique, sa jambe est dans un salle état. Mais l'autre jeune femme la remercie, expliquant la situation de celui qui l'accompagnait, et elle l'invite à s'asseoir, expliquant qu'elle est très pâle. Puis elle parle à Aiden, lui demandant des détails assez banals. Mais elle a le bon réflexe, se dit Phoenix, qui entreprend de faire pareil avec l'homme commotionné. Car oui, s'il s'est cogné, il ne faut pas qu'il perde connaissance, du moins le moins possible. "Bonjour, moi c'est Phoenix, vous vous appelez comment ? On va parler un peu tous les deux !" Son ton était aussi doux que la situation puisse le permettre. Elle s'était accroupie devant lui, ne voulant pas encombrer une place assise pour des gens plus meurtris qu'elle. "Si vous vous êtes cogné, il faut que vous restiez conscient, d'accord ? Racontez-moi un peu, votre vie, ce que vous avez envie !" La jeune femme l'écouta, le relançant de questions banales mais nécessaire pour son état de santé. Mais elle restait en alerte, prête à réagir à la moindre situation.

Aiden lui, ne semblait toujours pas rassuré, sursautant à un bruit non-identifié. Peut-être une autre bombe dans le lointain, mais cela pouvait être aussi un coup de feu tiré par la police pour disperser, ou pire. Il déclara qu'il fallait s'en aller. Elle était d'accord pour lui, il devait être évacué au plus vite vers un hôpital. Phoenix se tourna vers la dénommé Jessica - une femme qui avait l'air très jeune, mais très mature - et lui dit "Je reviens, tu peux faire attention à ce qu'aucun des deux ne perde connaissance ? Merci..." Elle se leva et se rendit vers le centre névralgique du poste de secours. Elle parla avec quelques secouristes, et eux aussi comprenaient bien l'urgence d'évacuer certains blessés vers l'hopital. La foule était moins dense, il était possible de faire circuler des ambulances. Ils lancèrent l'appel pour que des ambulances situées en périphérie de la scène de terreur se rapprochent, pendant que Phoenix attrapa son talkie walkie " On va avoir besoin d'agents pour sécuriser l'arrivée et le départ d'ambulances de ma position, on a beaucoup de blessés graves qui ne peuvent pas rester là " Les secouristes lui indiquèrent d'où les ambulances pourraient arriver et repartir. La jeune femme retrouva trois collègues, et surtout des barrières, positionnées là pour l'évènement, avant le chaos. Ils les déplacèrent de façon à créer un chemin plus sécurisé pour les ambulances. Elles pourraient se faire renverser mais Phoenix remarqua que les gens pensaient naturellement à trouver un autre chemin, c'était plutôt rassurant. Son épaule l'élançait terriblement, à la fin, elle ne pouvait plus le bouger sans craindre un haut le coeur terrible. Une fois les dernières barrières positionnées, elle quitta ses collègues, et revint vers Jessica, Aiden et l'autre homme, pour les prévenir. "Avec quelques policiers et secouristes on vient de préparer l'arrivée des premières ambulances, l'évacuation devrait être possible d'ici peu de temps, on a mis des barrières qui devraient tenir" Soudain, la jeune femme voyait beaucoup d'étoiles, encore une fois. Elle réussit à s'asseoir par terre, le temps de respirer un peu. Elle remit non sans peine son bras en écharpe, grimaçant horriblement pendant qu'elle devait le bouger. Elle souffla un bon coup, et reprit la parole "Aiden, ils ont vu ta blessure, ils m'ont dit que tu devrais faire partie des premiers évacués normalement, parce qu'ils ne veulent pas te retirer... ça... hors d'un environnement propre, pour ne pas infecter le tout" Elle espérait sincèrement qu'ils l'évacueraient et le soigneraient rapidement, parce que son état était assez préoccupant. Et même si la dernière fois qu'ils s'étaient vus était ... bizarre (enfin, la nuit avait été géniale, mais le réveil un peu moins), elle n'en éprouvait pas moins une sorte de tendresse envers lui, et surtout elle voulait que cette souffrance cesse.
En tous cas, des secouristes regardaient Aiden, l'un s'approcha même, constatant sa blessure. Les ambulances allaient bientôt arriver, on espérait.

Il sait que bien des regards vont se poser sur lui, il sait que bien du monde va commencer à s’amasser autour de sa misérable personne parce qu’il n’a pas été attentif, parce qu’il n’a fait attention à rien et parce qu’inconsciemment, à continuer de parler et à paniquer, Aiden n’attire que l’attention sur lui. Aussi, il choisit de se taire, il essaie de prendre sur lui, de ravaler toutes les vagues de douleur qui s’invitent en son for intérieur comme pour le briser, comme pour lui faire perdre toute raison, toute stabilité déjà bien assez fragilisée. Aiden combat la souffrance, Aiden se fait plus fort qu’il ne l’a jamais été tandis qu’il prend toujours sur lui. Tandis qu’il retient tous les mots qui lui traversent l’esprit, tas de jurons justifié à la blessure qu’il se doit d’endurer. Celle qu’on finit par venir voir, contre son gré, les demoiselles présentes s’assurant qu’il ne s’échappe pas, essayant de lui faire entendre que compliquer les choses n’arrangera rien à son état déjà critique ; que ce soit de son fait ou non, d’ailleurs. Il soupire, Aiden se laisse faire, Aiden lutte contre cette envie de tous les envoyer voir ailleurs, de tous les rejeter. Parce qu’il se doute assez qu’ils souhaiteront le garder, même lorsque tout s’arrangera. Parce qu’il se fout presque désormais de tout ce qui se passe alentours, plutôt concentré sur la perspective de sa liberté qui s’amenuise au fur et à mesure que les sirènes se rapprochent. Aiden ne veut pas avoir à faire à tout ça, pas même en sachant que ça pourrait l’aider, par la suite, à s’en sortir. Se défaire de ces habitudes-là n’est plus qu’un rêve utopique. Une éventualité que beaucoup croit possible, à commencer par les secouristes qui – enfin – parviennent jusqu’à lui. Ou presque, parce qu’ils regardent un peu tout le monde de la file, parce qu’ils les font un par un tandis que lui attend, dans son coin, là-bas au fond ; l’autre homme semblant reprendre du poil de la bête mais pas pour son plus grand plaisir. Parce qu’il donne de petites instructions à Jessica, parce qu’il lui dicte comment quoi, quoi faire, jusqu’à arracher un râle de douleur à Aiden qui s’était juré silence et force. Tout s’effondre sous les petites mains posées sur sa jambe, sur celle qu’il sent à nouveau et qui lui rappelle que le pire pourrait encore être à venir s’il choisit de continuer à faire l’idiot. « Ils foutent quoi, je vais pas tenir là... » Crache-t-il entre ses dents, l’une de ses mains posées sur celles de la jeune femme, l’autre trop proche du bout de bois pour que ses intentions ne soient pas trahies. Il vient laisser entendre – à sa manière – qu’il est d’accord pour partir, pour rejoindre ces centres dont il a horreur. Aiden choisit la raison plutôt que la stupidité, enfin.

Phoenix s'était sagement assise, sentant que les forces lui manquaient un peu. Elle écoutait Darius, le secouriste, prodiguer des conseils à Jessica. Celle-ci intimait d'ailleurs à Phoenix de ne plus bouger, car elle semblait avoir compris que Phoenix allait défaillir. Mais une fois assise, cela allait mieux, du moins la tête ne lui tournait plus. Elle voyait Aiden s'impatienter, il devait souffrir le martyr. Les secouristes s'affairaient, ils devraient bien s'arrêter prochainement sur son cas... En attendant, la jeune femme avec Phoenix faisait un point de compression sur la jambe de Aiden, pour arrêter le saignement. Phoenix aurait bien pris le relai, mais là, c'était purement impossible. Heureusement, Darius sortit un peu de sa torpeur et aida Jessica.

Les secouristes en charge, du moins ceux que la situation d'urgence avait propulsé comme tels, s'approchèrent enfin d'Aiden. Ils examinèrent rapidement et en conclurent que c'était suffisamment grave pour qu'il fasse partie des prochaines évacuations en ambulance. Ils dirent alors "On va vous évacuer vers l'hôpital, tenez bon !" Pour cela, il fallait que le passage soit dégagé, et comme le sol était jonché de blessé, Phoenix se leva. Son épaule la lançait depuis plusieurs minutes, la douleur était forte, parce que désormais c'était à froid, et non plus dans le feu de l'action. Elle se leva, alors que les secouristes avançaient avec Aiden. Phoenix lui adressa un regard un peu plus rassuré que précédemment "Courage Aiden, Ca va vite aller mieux. Prends bien soin de toi après ..." elle se doutait que Aiden n'était pas forcément du genre à donner des nouvelles, mais bon, il était entre de bonnes mains de toutes façons, tout ira bien ...

La jeune femme entendit que son talkie-walkie l'appelait. Elle entendait aussi que les secouristes lui parlaient, que le bruit autour d'elle augmentait. Et puis, plus rien. Suivi d'un sifflement aigu. Une vision qui se trouble. Une douleur intense. Puis une perte de sensations. La chute. Une autre douleur intense sur tout le côté gauche, allant de son épaule déjà meurtrie, sa hanche et sa tempe qui heurta le sol. Elle venait de s'évanouir, s'étalant de tout son long par terre. Elle avait perdu connaissance. Cette fois-ci, elle n'avait pas voulu jouer la Wonder woman, juste se lever pour facilité l'évacuation d'Aiden, qui devait être en train de monter dans l'ambulance. Mais la douleur à froid dans son épaule était trop violente et lui avait fait perdre connaissance.

Il hurle quand on vient se risquer à tirer sur ce qui le torturait, sur ce qui décorait sa jambe d’un rouge vif malgré le boisé souillé enfoncé. Aiden sent ses nerfs lâcher, tout son courage s’envoler pour ne plus rien lui offrir, plus rien hormis un peu de volonté ; une légère once tenace qui l’amène à s’accrocher comme un fou à la jeune femme tout juste rencontrée, pourtant déjà vue. Celle qui lui échappe ensuite, le laissant en proie à des secouristes qu’il ne connait pas, qu’il ne veut pas connaitre. Il veut Gethin, maintenant. Il se dit qu’il pourrait être là et c’est lui qu’il veut maintenant que la jeune femme l’a laissé à son sort. Les larmes perlent mais les cris s’étouffent entre ses dents tandis qu’on essaie de calmer l’hémorragie, tandis qu’une ambulance parvient enfin jusqu’à eux, saint Graal dans tout ce chaos. Mais, pourtant, ça le panique davantage, plus encore lorsque Phoenix, sous ses yeux, tombe à même le sol. Il semblerait qu’il ait hurlé son prénom mais même lui ne s’en rend pas compte, sous le choc, craintif, apeuré quant à ce qui est à prévoir désormais. Ils veulent l’emmener mais il ne peut pas la laisser, pas comme ça, pas en sachant qu’il lui faut bien plus de soins qu’à lui… parce qu’il n’en vaut pas la peine, Aiden ne s’en est que trop convaincu et c’est ce qu’il essaie d’ailleurs, instinctivement, de faire valoir alors qu’on essaie de le lever de sa chaise. « Non ! Non, pas moi ! Elle a besoin de vous, elle en a plus besoin que moi, on s’en fout ! » Il se débat à s’en faire mal, à en tomber lui aussi au sol alors qu’il guette ses réactions, alors que toutes ses peurs lui reviennent en pleine tête. Phoenix qui tombe et le reste. Qu’est-il arrivé à Gethin, à Jade, à Salvatore qu’il avait cru voir avant que l’enfer ne se déchaine sur la place ? Ce sont des questions qui viennent frapper dans son esprit, des interrogations qui le font perdre pied, toute stabilité. « Jessica, dis leur ! Dis leur qu’ils doivent l’emmener elle ! » Il essaie de la prendre à témoin, stupidement. Parce qu’il n’a pas conscience que le monde pense différemment que lui, parce qu’il n’a pas conscience d’être une personne à part entière pour eux ; contrairement à l’opinion qu’il porte à sa propre existence.

Phoenix était allongée, inconsciente par terre. Elle n'était plus là, sa chute lui avait fait perdre connaissance. Cela dura assez longtemps, tout de même. Elle avait déjà fait des malaises, de ceux dont on se réveille en quelques secondes, et qui se soulage avec une petite douceur sucrée. Mais là, ce n'était pas pareil. Mais d'un coup, elle revient à elle. Elle le sent car très brusquement la douleur à l'épaule devient insupportable. Les sensations reviennent, elle entend à nouveau le bordel qui l'entoure, elle sent une main tenir la sienne, elle sent une grande douleur à la tête, elle sent aussi un peu de sang couler sur sa tempe. Elle entend aussi Aiden hurler, mais elle ne comprend pas trop ce qu'il dit. Elle ouvre les yeux, mais tout est flou. Elle serre la main de Jessica, n'essayant pas de parler, cela a l'air encore trop difficile. Elle a en revanche absolument besoin de bouger, car être tombée sur son épaule déboitée est une source de souffrance incroyable. Alors elle parle, doucement "Il faut que je me retourne, j'ai trop mal à l'épaule". Elle n'est pas sûre d'avoir été très claire, mais elle accompagne faiblement le geste à la parole, et se met à pivoter lentement, pour se retrouver allongée sur le dos. La douleur est encore là, mais c'est moins violent.

Elle voit enfin moins flou. Elle distingue Jessica, encore là près d'elle. Elle ne devrait pas rester. Elle n'a rien, elle devrait rentrer chez elle. Et Aiden, était-il pris en charge ? Phoenix l'espérait vraiment. Elle se devait d'en parler à celle qui était à son chevet "Il faut qu'ils emmènent Aiden, moi tant que je reste là, je peux attendre..." Sa voix était faiblarde, mais la détermination était bien là. Et elle ajouta "Et vous, vous devriez rentrer chez vous. C'est encore dangereux ici... Vous n'avez pas à vous occuper de moi, merci d'être restée jusque là, mais vous devez penser à vous maintenant !" Elle était flic, censée aider les gens, et se retrouver dans la position inverse était ridicule, Phoenix se trouvait pathétique. Retrouvant ses esprits, elle s'aida de son bras valide pour se redresser un peu, atteignant une position assise, adossée. Elle n'était vraiment reconnaissante envers Jessica, mais elle ne voulait pas la déranger plus, il valait mieux qu'elle rentre chez elle et soit à l'abri de toute menace.

La jeune femme reprend pied peu à peu. Elle a au moins réussi, avec l'aide de Jessica à pivoter sur le côté, pour soulager son épaule blessée. Mais rapidement elle demande à la brune de partir, de rentrer chez elle. Mais celle ci fond en larmes, expliquant qu'elle craint pour la vie de son petit ami et de son père tous deux présents. Apres d'être assise, la jeune femme attrape la main de Jessica doucement et lui dit "Il y a un endroit au bout de la rue, normalement y aura une équipe de flics, ils pourront vous renseigner s'ils savent quelque chose pour votre petit ami... J'espère que ça va aller" Elle le pensait très sincèrement. Elle espérait que cette jeune femme n'allait pas souffrir la perte ou blessure grave d'un de ses proches, car elle l'aidait admirablement.
Mais
Les ambulanciers s'adressaient à Phoenix. Voyant son uniforme, ils lui demandèrent directement ce qu'elle avait "J'ai dû me déboîter l'épaule, mais ça va c'est pas cassé " Tout cela pour éviter qu'on ne lui fasse prendre la place d'Aiden, dont la jambe courrait un danger grave s'il n'était pas pris en charge rapidement, alors que l'état de Phoenix ne devrait pas empirer. Un secouriste s'approche d'elle et examine ses pupilles avant de lui proposer de venir avec Aiden dans l'ambulance si elle peut se lever. Elle hocha la tête, mais avant de se lever, se tourna vers Jessica "Merci beaucoup, vraiment. J'espère que ça ira pour toi et tes proches... " Elle lui serra doucement la main, puis relâcha la pression pour prendre appui de son bras valide sur le sol. Elle eut un peu de mal mais parvint à se lever. Elle regarda encore celle qui l'avait aidée, ne sachant que dire et que faire. Elle devait y aller, mais se trouvait particulièrement ingrate... Elle n'eut le temps que de lui sourire, avant de devoir s'éloigner à la suite des ambulanciers. Elle avait dû prendre une grande inspiration, mais finalement elle arrivait à marcher. Elle les laissa installer Aiden, puis vint s'asseoir à ses côtés sur un petit siège prévu à cet effet. Bon, elle était clairement mieux en position assise que debout. Mais elle n'arrivait pas à en démordre : etre flic et se faire évacuer alors que rien n'était fini, ce n'était pas juste. Elle s'en voulait, à propos de son métier, de tous ces gens blessés, et de Jessica, qu'elle ne pouvait pas aider en retour.

On lui demande de se taire, on essaie de lui dire de se calmer parce qu’il empire les choses. Bien-sûr qu’il le fait puisqu’il n’est pas celui dont on doit s’occuper, parce qu’il ne vaut rien et c’est une conclusion qui s’est inscrite dans sa tête, un fait dont il s’est persuadé et avec volonté. Assez pour qu’il n’en démorde pas malgré le silence que Jessica laisse planer après qu’il se soit risqué à la prendre en témoin. Évidemment, que pouvait-elle faire d’autre, de toute manière, dans ce genre de circonstances ? Il avait alors continué de hurler, il s’était laissé prendre par l’euphorie de l’instant mais aussi par la douleur qui le transperce sans ne cesser qu’une seule seconde. Il n’y a ni répit, ni temps d’arrêt. Jusqu’à ce qu’elle ne semble revenir à elle, jusqu’à ce qu’il parvienne à voir l’un des ambulanciers s’approcher de la jeune femme comme pour, probablement, la convaincre de les suivre ; au moins pour parvenir à embarquer le drogué qui, instinctivement, continue de gesticuler pour parer à la souffrance qu’il se doit d’endurer en restant debout, bêtement. Il essaie d’entendre, il essaie de comprendre, il veut s’assurer qu’elle ne refusera pas une nouvelle fois le besoin d’Aiden de la savoir en sécurité, même si elle doit prendre sa place pour cela. Alors, il tend l’oreille jusqu’à la voir se relever, lentement mais surement. Il tend l’oreille jusqu’à comprendre qu’elle va suivre, jusqu’à comprendre qu’elle n’insistera pas plus qu’elle ne l’a déjà fait. Il s’en soulage, silencieusement, Aiden se calme, ne se débattant plus avec autant d’élan qu’il ne l’avait fait auparavant, n’essayant d’avancer qu’une fois qu’elle fut à portée avant de comprendre qu’il doit, lui aussi, suivre le mouvement des ambulanciers. Ce qu’il laisse faire, sans broncher maintenant, s’en retournant tout de même un instant, sans aucun mot, l’azur clair de ses prunelles seulement posé sur la silhouette qu’ils abandonnent, celle qu’ils laissent à son propre sort parmi le chaos, celle qu’il imprime dans sa mémoire comme pour ne pas perdre ses traits, jamais. Parce qu’il sera tenté d’écrire sur elle et plus d’une fois, parce qu’il y pense déjà d’ailleurs, sans trop encore s’en rendre compte. Aiden persiste à la contempler avant que les portes ne se ferment, avant que la réalité ne s’impose à lui, avant que ses prunelles ne se portent sur Phoenix. « Ils vont arranger ça. » Laisse-t-il entendre en désignant son épaule. « Ils vont le faire… » Souffle-t-il plus doucement, se laissant lentement sombrer ; grand bien lui fasse.