this is who you are
( in this story you are the hero )Lowen est le dernier d’une famille de trois enfants : Liam qui a 7 ans de plus que lui et Laoise âgée d'un peu plus d’un an de plus que lui. Il a grandi à New York, dans les beaux quartiers sans jamais manquer de rien et jusqu’à ses sept ans son histoire était des plus normales. Mais une partie de sa vie bascula totalement à ce moment-là.
Il ne pourrait pas raconter exactement ce qui s’est passé, ses souvenirs sont flous, voire presque inexistants de cette soirée. Une sorte d’amnésie psychogène selon d’éminents spécialistes.
La soirée s’était déroulée comme d’habitude, comme chaque vendredi soir ou presque Liam était chez des amis et ne rentrerait que plus tard dans la soirée, il était donc seul à la maison avec ses parents et sa sœur. Ils venaient de dîner et les deux gosses, après avoir regardé un énième dessin animé, avaient dû aller se coucher. Et bien qu’ils partageaient encore la même chambre, ils ne tardèrent pas à s’endormir pour se réveiller quelques heures plus tard. Et ce fut les cris qui les réveillèrent. D’horreur ou de douleur, il ne faisait pas bien la différence. La voix paniquée de leur mère résonna ensuite suivie, quelques instants plus, tard d’un choc, d’un bruit comme si elle était tombée des escaliers. Laoise avait déjà fait ce genre de chute, c’était le même bruit Lowen en était certain. Les deux gosses s’étaient regardés, apeurés, ne sachant pas quoi faire. Ils avaient peur de sortir. Peur de ce qu’ils allaient trouver en dehors de leur chambre.
Mais si leur maman était juste blessée, peut-être qu’ils devaient appeler les secours ? Et ils le connaissaient par cœur, ce numéro. Leurs parents leur avaient appris tous les numéros d’urgences pour qu’ils puissent se débrouiller en cas de soucis.
Ils mourraient envie d’aller se cacher, leur instinct leur hurlait de ne pas sortir. Ou du moins, lui ressentait ça, cette peur panique et il pouvait lire la même dans les yeux de sa sœur.
Ils étaient sortis de leur « tanière », ils avaient à peine fait quelques pas qu’ils tombèrent nez à nez avec un inconnu. Un homme armé d’un couteau plein de sang. Derrière lui, en bas de l’escalier les gamins pouvaient discerner la silhouette immobile de leur mère, une petite mare de sang avait commencé à naître sous elle.
Les souvenirs se brouillaient. Il n’y avait plus que le cri suraigu de Laoise qui résonna avant de se stopper net tandis qu’elle tombait une plaie mortelle au cou. Il se rappelle avoir fixe le visage de l’homme sans arriver à crier à s’enfuir. Visage qui aujourd’hui est toujours aussi flou. Puis il y avait eu la douleur dans la poitrine et plus rien. Le trou noir béant.
Le souvenir d’après se situait à l’hôpital où il avait été transporté en urgences. Liam ainsi que ses grands-parents étaient présents. Mais il n’y avait ni son père, ni sa mère ni même sa sœur. Ils ne seraient plus jamais-là.
L’enquête sur ce massacre fut un total échec. Il n’y avait pas d’empreintes valables, il n’y avait aucun suspect, les voisins n’avaient rien vu. Le seul qui aurait pu donner une piste était Lowen. Lowen qui était incapable de décrire l’homme. Lowen dont la seule chance avait été que l’homme le laisse pour mort.
Les deux garçons partirent vivre avec leurs grands-parents paternels et ils essayèrent de se reconstruire. Pour oublier la peine, la perte, ils étaient pourris gâtés comme si cela pouvait racheter les vies perdues.
Mais les cauchemars revenaient pour le plus jeune chaque nuit, malgré les médicaments, ainsi qu’une sorte d'hallucination qui prenait la forme de sa sœur, et elle lui paraissait si réelle que du haut de 7 ans il était certain d’avoir un fantôme en face… mais avant qu’il ait pu lui parler, elle disparaissait toujours, laissant un goût amer dans la bouche du gamin qui ne comprenait pas ce qui se passait et qui n’osait pas en parler à son frère de peur qu’il se moque de lui.
Liam, lui, prônait haut et fort que l’enquête était bâclée et menait sa propre enquête pour donner des preuves aux policiers comme un adolescent pouvait le faire. Il n'y avait même pas un motif valable pour le massacre, leur père était juge, il s'était fait des ennemis, c'était un bon motif... Tout comme cela pouvait être un cambriolage qui avait mal tourné, ou alors un psychopathe comme on en voit dans certaines séries...
Mais Liam, lui aussi, fit chou blanc, alors un soir, l’adolescent fit la promesse de devenir policier, parce que ça serait le seul moyen de reprendre l’enquête. Il avait presque 15 ans, il lui suffisait d’attendre quelques années. Ce meurtrier, il le trouverait, il le promit au cadet.
Les années passèrent, Liam arriva à intégrer l’école de police comme il se l’était promis et si avenir était prometteur celui de Lowen était plus en dent de scie. Il y avait toujours ses cauchemars de cette nuit-là et même s’ils revenaient moins souvent ils étaient toujours un peu présents. Les hallucinations quant à elles étaient presque parties… mais au lieu d’être soulagé le garçon de maintenant presque 14 ans était désespéré. Il voulait encore voir sa sœur, même si ce n’était que par cette hallucination. Il voulait faire revenir ce qu’il pensait toujours être un fantôme et il avait commencé à lire des livres (ou des sites) sur la sorcellerie, la magie, des rites. Si cela pouvait paraitre inoffensif, à l’école les autres l’évitaient, le trouvaient juste bizarre. Il avait des notes assez moyennes mais s’en contentait. Il se noyait dans ce passé sans que sa famille ne puisse rien faire, malgré tout il n’était pas malheureux. Cette vie lui allait tout à fait, elle lui plaisait. Il savait que s’il avait fait un peu plus attention à lui, il aurait pu sortir avec des filles, avoir plus d’amis, mais à ce moment-là, cela ne l’intéressait pas.
Et puis il y eut l’électrochoc, celui qui changea le tout au tout. Il avait alors un peu plus de seize ans, il revenait du lycée en scooter roulant certainement un peu trop vite sur le sol mouillé. Le contrôle de sa moto lui échappa et il chuta, glissa assez durement sur le sol. Pendant ces quelques secondes il eut l’impression que sa vie défilait devant lui. Il n’avait rien accompli. Rien qui puisse rendre fier ses parents, sa sœur et cela devait changer. A part un bras cassé et quelques côtes fêlées il s’en était plutôt bien sorti. La vie lui avait donné une nouvelle chance, la dernière probablement, et il devait la saisir. Il devait avoir son destin entre les mains. Il devait pouvoir contrôler la situation.
Il commença dès lors le sport, beaucoup de sport avec cette impression agréable que cela ne nettoyait de toutes ses mauvaises ondes. Il se mit à travailler pour avoir de meilleurs résultats et pouvoir intégrer n’importe quel cursus.
Et c’est ainsi qu’après le lycée il intégra les études de droit. Pas franchement certain que cela était sa voie, mais c’était ce qui lui semblait le « moins pire ».
Les années passèrent, il était à présent avocat et sortait avec une jeune femme –Lucy- étudiante en médecine. Le futur semblait lui sourire, et ce depuis qu’il était enfin arrivé à se reprendre en main. Il avait un métier qui lui plaisait et qui lui faisait gagner pas mal d’argent, même s’il était loin, très loin même d’être le plus doué dans le domaine –mais avec l’argent on peut faire tant de choses-.
Par ailleurs, dès que Lucy aurait fini ses études, dès qu’elle aurait elle aussi une situation stable, ils pourraient peut-être fonder une famille, du moins s’ils étaient toujours ensemble. Comme dans tous les couples, il y avait des hauts et des bas, et il fallait bien avouer que malgré tout l’amour qu’il lui portait, il lui était arrivé de la tromper plusieurs fois. Il le cachait, il se trouver de faux alibis, mais même s’il n’aimait pas ses mensonges, il n’arrivait pas à arrêter les aventures extra-conjugales. Peut-être parce qu’il aimait un peu trop la vie, les femmes ; peut-être pour tout autre chose. Tout ce que l’on ignore ne peut pas faire de mal n’est-ce pas ?
Quant aux fantômes du passé, ils étaient loin même si parfois ils revenaient au grand galop dans des cauchemars mais c’était assez rare, ou alors quand il était très angoissé.
Octobre 2014, une manifestation avait lieu en centre-ville après que des gamins aient été tués par des flics. Tout aurait pu bien se passer mais rapidement la situation avait dégénéré, dans les rangs des manifestants certains petits rigolos avaient commencé à attaquer les flics, il y avait des bousculades… Des gens commençaient à tomber tandis que les flics, sur les dents, devenaient agressifs. Lucy était là pour soigner les éventuels blessés, elle était là en tant que bénévole prenant sur un de ses jours congés. Lui n’avait pas pu se libérer mais il savait qu’elle ne risquait rien, elle était avec un de ses frères qui la raisonnerait si la situation dégénèrerait trop. En théorie du moins. Parce que la vérité était beaucoup plus horrible.
Certains des policiers l’avaient pris pour cible croyant qu’elle venait de leur jeter quelque chose dessus, et elle était morte, stupidement à cause d’un coup de matraque et d’une mauvaise chute.
Encore une fois ces foutus poulets ne servaient à rien. A rien, si ce n’est apporter le malheur.
Et il les haïssait. Pas tous, certains étaient respectables mais la plupart n’étaient que des sous-merdes à ses yeux. Des types qui n’étaient bons à rien. Représentant de la loi, ce terme n’était qu’un mensonge et il en avait eu plusieurs fois la preuve.
Il voulait la peau des coupables de la mort de Lucy. Il voulait les tuer de ses propres mains. C’était une idée entêtante, beaucoup trop envahissante à son goût. Et surtout anormale de ressentir ce genre de choses, de désir.
C’était il y a presque deux ans, la vie a repris son cours le plus normal. Mais il y a toujours cette idée de vengeance, il peut la sentir, l’entendre comme le « tic-tac » d’une horloge. Toujours cette envie de sang. Mais il essaye de la canaliser. Il n’est pas un de ces psychopathes qu’il envoie en prison. Il ne veut pas être l’un d’eux.