( in this story you are the hero )
Ma vie aurait pu être banale ou des plus cauchemardesques qui soit, ma bonne étoile est née sous le signe de la douleur d’un ciel sombre, mais le destin peut être trompeur et, au tournant, nous ouvrir des chemins que nous n’aurions jamais pu emprunter, aborder... J’aurai dû être une fille des plus bas quartiers de Dublin, tout ce qu’il y a de plus banal, voire peut-être normale, avec l’avenir détruit ou parcouru de durs combats dans la douleur, avant d’avoir eu la chance de débuter dans la douceur sans n’avoir jamais été entourée d’une famille, de parents attentionnés ou avec des membres temporaires d’un logement temporaire… Mais voilà, la normalité, le parcours bancal n’a jamais été vraiment ce qui a caractérisait ma vie, je peux même vous affirmer que ma vie a été sortie de l’ombre pour fleurir sous les plus beaux jours, entourée d’amour et de patience, je n’avais que seize mois quand tout a basculé pour moi, je ne m’en souviens donc pas.

On pourrait penser que ne pas se rappeler aide à ne pas souffrir, mais cela soulève d’autres tourments que nul autre ne peut comprendre, imaginer, effleurer. Des interrogations muettes ou de simples troubles qui vous consument, qui vous animent par moment. Bien plus invisible, une souffrance marquée à l’encre indélébile, sur votre peau, dans votre regard, dans des gestes. Et ai-je envie d’en savoir plus ? Je fus parfois bien tentée d’endormir les tourments, ce besoin de tout comprendre, de tout connaître, pour ne plus penser à ce pan de moi inconnu qui me terrifie, à l’instar de mon frère aîné qui, lui, souffrait de trop en savoir. Je n’arrivais donc simplement pas à franchir le cap des questions à poser, des recherches à accomplir.

Vous vous demandez encore pourquoi ?

Ma réponse sera simplement : la peur, l’amour. Oui, avais-je envie de faire mal à ceux qui m’avaient sauvée pour retrouver ce passé et savoir si j’ai les yeux de ma mère ou les traits d’un père inconnu dans la bataille de ma nativité ?

Dans le fond, est-ce que la douleur du vide sera moindre que la douleur du savoir ? Je n’ai le souvenir que de ma famille adoptive, je me dis que c’est certainement mieux ainsi, ils sont à mes yeux bien plus importants que cette part de vie absente qui aurait dû être la mienne. Et qui aurait sûrement été bien plus horrible que la vie qu’ils m’ont tous donné, et c’est là que baigne toute ma joie de vivre, mes certitudes, ma capacité à lutter dans ma vie de tous les jours. J’aimais les miens, j’aime ma vie et c’est bien la seule chose dont je suis certaine !

A présent, oublions tout ça et passons à ce parcours qui a fait vraiment celle que je suis aujourd’hui !

Je suis la cadette d’une fratrie de trois enfants, la seconde fille entourée de deux aînés bien trop casse-pieds, que j’aimais torturer de mes petits plans tordus ou mes intrusions dans leur vie. J’aime profondément les miens et, aussi loin que je me souvienne, Christopher est celui qui fut le plus proche de moi, dans ma vie d’enfant. Il est aussi celui qui m’a parfois trop étouffée et pourri le plus mes plans, je dois bien l’avouer, mais en grandissant je lui ai bien souvent rendu l’appareille, à mon image il a été adopté lui aussi, mais là je radote. Si ce n’est le fait que nos vies ont commencé par un drame, par la naissance d’une mère avec le même mode de vie ? Je vous laisse trouver la réponse pour moi, il n’est juste pas un frère adoptif mais un frère de sang, pour Eva c’est plus compliqué, je l’aimais, je la détestais, je l’adorais, elle m’insupportait, je passais d’un sentiment à l’autre, mais si on la touchait, je griffais, j’étais la seule à pouvoir la saouler tout comme je pensais avoir le droit à être la seule à pouvoir les rendre chèvre. J’avais dix-huit ans quand j’ai commencé à mon tour à me rebeller, la raison, la perte de ma sœur, et ma belle-sœur dans les attentats des deux tours ou elles travailler et bien sûr auquel aucun de nous n’était préparer.

Si avant ce drame, Chris, bien plus difficile à vivre m’avait ouvert des portes et je n’avais jamais eu à taper du pied pour gagner des libertés que mes deux aînés n’ont pas eu loisir de discuter. Ainsi, j’ai arrêté les vacances, week-ends organisés survivalistes en famille, l’escalade, et la gym et la danse que je pratiquais depuis mon plus jeune âge, personne n’y trouvait à redire, on était tournée vers Chris jeune veuve avec un fils de quatre mois. Dans le même mode de rébellion, j’ai du jour au lendemain décrété que la suite de mes études serait en médecine, et je m’en suis donné les moyens. Je redoublé d’effort dans ma solitude et dans mes études, devenant limite invisible au miens restant sur le campus, la rupture fut complète avec les miens.

Mais comme nous sommes entre amis pas vrai, je vais vous avouez que sa perte me toucha plus profondément et me changea aussi. La période de mon deuil fut compliquée, je me fermais, m’isolais et le fait de me retrouver dans mon petit logement avec non loin ma meilleure amie de l’époque me sauva de bien des façons.

Évidemment, vous devinez bien que je cherchais à composer et rien de mieux que le dénie, le tout premier de ma petite vie en somme qui me reviendrait un jour royalement au visage. Cependant, vint le temps où les bourses et mes gardes ne suffisais plus à palier au prix de New-york, la rechute fut dure, compliquée, et je rentré à la maison, me retrouvant face à ma mère qui n’était plus que l’ombre d’elle-même, mon père avait disparu, fuyant à son tour la douleur, mon frère quant à lui avait trouvé un travail sur une plateforme pétrolière proche de cuba et aidait grandement ma mère et ma petite vie étudiante, nous laissant prendre soins de mon neveu. J’apprenais donc à mon tour à recomposer avec le passé.

Rapidement, je fis le choix de prendre possession du vieux grenier pour en faire ma chambre l’aménageant avec mes petits revenus. La raison, l’éloignement visuel et auditif. Mes journées je les passais à bûcher ma dernière année de médecine universitaire et mes soirées de libres étaient pour mon neuve et ma meilleure amie en caméra, sa vie avait sombré et nous étions quelque part devenues des rochers pour éviter la noyade, de l’une et de l’autre, nous défiant à la survie dans un monde qui nous échappait...

Sauf qu’en six mois face à l’alcoolisme et la dépression de ma mère qui sombrait de plus en plus dans la bouteille je dû me résoudre à quitter mes études, ma bourse passait dans ses tentatives de traitements, dans l’alcool, tout comme les envois de mon frère, j’allais donc de petits emplois à petits contrats pour adapter mes heures à celles de mon neveu âgé de trois ans et tentais de nous sortir de sa glissade impossible. En 2006 encouragée par mes proches, je passai les concours de secouriste et décrochai une place à la caserne Brooklyn où je suis encore à ce jour, je ne vis plus avec ma mère, mon neveu dans mes bagages on a tous les deux composé notre vie avec les allées et venues de son père et mes horaires.